Note sur la science vs. sapience
La méthode scientifique a été largement étudiée au XXème siècle : son produit est le paradigme scientifique au sens de Thomas Kuhn : au sens des principes et méthodes partagés par une communauté scientifique. C'est un modèle épistémique qui fait autorité et regroupe les chercheurs pour un temps, puis sera remplacé par un autre à la suite d'une révolution scientifique qui changera profondément les manières de voir.
Thomas Kuhn insiste sur le fait que ce ne sont pas tant les méthodes que les manières inconciliables de voir le monde, les conceptions différentes de la nature, qui différencient les paradigmes entre eux. " La science normale [...] est fondée sur la présomption que le groupe scientifique sait comment est constitué le monde".
Il précise ensuite le concept de matrice disciplinaire qui "implique une possession commune de la part des spécialistes d'une discipline particulière ; matrice, parce que cet ensemble se compose d'éléments ordonnés de diverses sortes, dont chacun demande une étude détaillée. La totalité ou la plupart des éléments faisant l'objet de l'adhésion du groupe [...] en tant que tel, ils forment un tout et fonctionnent ensemble". De façon à pouvoir mieux l'étudier et l'articuler nous appelons "sapience" l'encours d'une matrice disciplinaire dont la possession commune peut être personnelle, propre à une recherche, résultat d'une analyse collective, dépendant de la cohérence obtenue à partir d'une humanumérique nouvelle.
L'on peut donc en conclure que si les paradigmes scientifiques évoluent, c'est sous la pression des sapiences particulières qui se construisent par réfutation et validations expérimentales. Ce qui réconcilie en partie Russell et Kuhn.